mercredi 18 novembre 2009

Champ d’étude voyageur


l’appel au Champ Dormant

Quand tout est fait de la bonne lumière et de la chaleur, les végétaux ferment boutique, se dénudent de l’inutile, entrent sous terre. Ils se départissent du gélif et ne gardent que les pieds au chaud. Encore: ils meurent et se défont. De toute la population d’une espèce souvent il ne restera pour l’hiver que la forme patiente du printemps: les graines des annuelles par exemple. Un peuple entier disparu dont ne reste que des petits morceaux de rêve. Des embryons faits pour attendre. Ou voyager. Les graines des plantes sont de petites machines à traverser l’espace et le temps.



échantillons campestres

Cette vie suspendue des plantes, ce curieux hiatus des générations où tout le monde disparaît, est donc bien plus qu’une hibernation, un pont vers une autre saison. Les yeux fermés on attend ce qui arrivera: mais aussi, quand nous les ouvrirons, où serons-nous? De quoi sera fait le milieu? Avec les graines les plantes sont préparées à faire face à tout. Pour voyager elles envoient la génération suivante qui n’amène que le minimum et se fait légère: un vecteur (vent, oiseau, humain) s’occupe de toute cette dépense en énergie pour se déplacer. Se moquer de l’immobilité des végétaux c’est notre façon de nier qu’ils se servent de nous...comme des oiseaux ou du vent. Notre excès d’animation est tout ce qui leur faut pour voyager un maximum.


carottes ensommeillées

Le vent, lui, ne pose pas de question: lui aussi pousse et porte fruit. Les végétaux comptent sur la plus complète miniaturisation de toutes pièces d’équipements: ce n’est pas l’organe qu’ils apportent, c’est son ébauche à ressort et le plan pour construire le reste, le code génétique. Prêts à bondir quand l’occasion se présente. C’est toute la confiance en leur adaptabilité qu’ont les végétaux. Et au cas où, ils feront d’énormes quantités de petits voyageurs sans autres investissements parentaux. Avec ce code et aux simples conditions de trouver de l’eau, de la lumière et de l’air ils construisent ensuite sur le champ tout le nécessaire. Cette permanente relocalisation de l’entreprise (du quartier industriel au complet!) a été inventé il y a bien longtemps.



chicorée rêvant

Une parcimonie trompeuse donc la graine. La force du tigre et la taille de l’éléphant comprimées dans quelques millimètres. On se trompe comme on se trompe habituellement quand on juge les végétaux: des simplets croit-on, à peine différents d’un caillou ou d’un nuage. Mais des simplets avec un code génétique plus grand que le nôtre bien souvent! Tant d’efforts investis dans cette fausse parcimonie. Avez-vous remarqué que nous sommes entourés? Et que nous sommes dépendants...



dans la paume de ma main: tout un champ portatif et embryonnaire

Et sous la ligne de gel n’imaginez pas que ces graines font rien. Des processus discrets et lents ont lieu: la stratification par exemple. Pour bien des espèces ce passage obligé avant la germination est une forme de comptage des jours, on mesure le temps et on lit la météo. Mais il y a plus. Est-on profondément enfoui, on attend. Des décennies. Un coup de pelle des humains nous ramènent à la surface: on bondit! Les plantes savent donc se situer dans la profondeur du sol. Elles se dépenseront innombrables sans compter. La banque est grande. Patience de l’opportunité ou tir tous azimuts: même combat!


un peu plus loin, un peu plus tard


Qu’avez-vous dans la main Monsieur? J’ai pris le champs, Madame, et je l'amène plus loin.

Champ d’étude voyageur: il y a de l’eau sur la lune.




Aucun commentaire:

Publier un commentaire